L’art de faire du thé (à l’anglaise)

Ren­con­tre avec un col­lègue à la pause autour de la bouil­loire qui ron­ronne. On attend, un peu embar­rassés, que l’eau cuise. Sa tasse est prête: un minus­cule gob­elet en car­ton, de ceux que d’autres utilisent pour leur espres­so, avec à l’in­térieur un sachet d’Earl Grey et un mon­tic­ule de sucre qui atteint gail­larde­ment  la mi-hau­teur du récip­i­ent. Lorsque l’eau bout, je lui pro­pose poli­ment de le servir. Mais sitôt ai-je com­mencé de vers­er qu’il m’ar­rête avec énergie: “Stop! Stop”. Pour­tant, c’est à peine si le gob­elet est à moitié plein!  “Sinon, je vais devoir met­tre deux sachets!”  Me revient alors le sou­venir de l’Ir­lande, pays où le thé, sur­chargé en sachets, était presque imbuvable. Mon col­lègue aurait-t-il des gènes de là-bas? Sans le savoir, il répond aus­sitôt à ma ques­tion: “Pour un Anglais, c’est impens­able autrement! Comme dis­ait mon grand-père, un bon thé, il faut que la cuil­lère y tienne debout toute seule! Et en plus, on a même pas de vrai lait…” Il s’en va, une crème à café et le pré­cieux breuvage à la main, non sans jeter un regard méprisant sur ma tasse: “Et ça, ce n’est pas du vrai thé!”  Une tisane de men­the  sans sucre, dans une grande tasse en porce­laine (anglaise, d’ailleurs), bien sûr que ce n’est pas du vrai thé. Rien à voir avec son dé à coudre rem­pli de bitume sucré… Qui à mon hum­ble avis, n’est pas du vrai thé non plus! C’est pra­tique­ment du café…

Les commentaires sont fermés.