Souvenirs du caméléon botanique

Un petit tour et puis s’en va… Ain­si s’est achevée il y a quinze jours l’ex­po­si­tion que mon amie Rachel et moi-même avions mon­tée à la Tour du Sauvage à Romont. Trois ans après mon expo indi­vidu­elle, j’ai eu grand plaisir à retrou­ver ce local tout en molasse et en poutraisons. Même si il y est tou­jours aus­si déli­cat d’y sus­pendre des tableaux, entre les câbles mal placés qui font flot­ter les tableaux trop loin des murs, les clous bran­lants, et surtout l’hu­mid­ité qui y règne en maîtresse (un ou deux dessins en ont d’ailleurs un peu souf­fert, mal­gré les petits sachets de riz que j’avais col­lés der­rière). Il est vrai que nous ouvri­ons la sai­son des fameuses expo­si­tions heb­do­madaires, et qu’en cette fin du mois de juin, la météo s’est révélée plu­vieuse et ven­teuse presque toute la semaine (une nuit, je me suis même réveil­lée en sur­saut, per­suadée de ne pas avoir fer­mé une des fenêtres de la Tour, et m’at­ten­dant à retrou­ver l’ex­po­si­tion dévastée le lende­main. Heureuse­ment la fenêtre était bien close). Avec une oasis mirac­uleuse qui tombait pile le jour du vernissage. Un vernissage un peu atyp­ique, organ­isé le dimanche, et qui s’est déroulé à mer­veille au rythme de la musique et des cock­tails au cit­ron vert (comme dis­ait Muriel, une anci­enne “col­lègue” d’ex­po, à chaque vernissage, on s’améliore!). Rachel et moi avions décidé de com­bin­er nos tal­ents de pho­tographe et d’il­lus­tra­trice sur le même sup­port, en priv­ilé­giant les sujets nat­u­ral­istes, et l’idée, apparem­ment, a fait mouche. Les échos ont été excel­lents; nous avons même eu droit aux com­pli­ments d’un pein­tre de la région. Mais surtout, et c’est le plus grat­i­fi­ant, les vis­i­teurs repar­taient l’oeil pétil­lant et le sourire aux lèvres, comme si nos tableaux les avaient chargés d’é­mo­tions pos­i­tives. A pro­pos d’é­mo­tions, nous en avons par­fois eu de fortes. La veille du vernissage, une bouteille de vin (rouge, bien enten­du) s’est brisée au pre­mier étage, tra­ver­sant le planch­er et man­quant d’ar­roser un tableau pen­du juste en dessous. Nous avons pu éponger in extrem­is. Restait une tenace odeur de vinasse qui a imprégné la tour pen­dant des jours (réflex­ion d’un ami: “Vous êtes en train de vous piquer le tube”?)… Les planch­ers des vielles tours, ce n’est donc pas étanche, mais heureuse­ment, la chance était avec nous. Les araignées aus­si, d’ailleurs. Car ces murs pleins de trous étaient le roy­aume de tégé­naires par­ti­c­ulière­ment gross­es et poilues, qui sor­taient par­fois inopiné­ment de leurs cachettes, à la queue-leu-leu, comme pour regarder ce qui se pas­sait. Pour le coup, entre arachno­phobes, nous avons bien fail­li lâch­er un ou deux tableaux! Nous avons aus­si dû lut­ter avec les ampoules, qui s’ingé­ni­aient à cla­quer les unes après les autres. Et bien sûr, impos­si­ble de s’en pro­cur­er au vil­lage, dont toutes les bou­tiques un peu spé­cial­isées sem­blaient sur le point de fer­mer défini­tive­ment. Ain­si, la nappe en papi­er du vernissage est l’un des derniers ves­tiges du mag­a­sin “A la ville de Romont”… Une semaine, mal­gré les longues heures de gar­di­en­nage, ça passe vite. Nous avons dû décrocher alors qu’il nous sem­blait avoir à peine fini d’ac­crocher, et avons ressen­ti soudain comme un grand vide. Après tout, nous avions tra­vail­lé presque une année et demi pour cette expo­si­tion! Une chose est sûre: nous ne pour­rons pas rentabilis­er notre tra­vail comme prévu en exposant nos tableaux ailleurs. Car le suc­cès était au ren­dez-vous, et presque tous les tableaux ont trou­vé pre­neur! Bien sûr, nous avons un peu mal au coeur à l’idée de nous en sépar­er, puisque nous avions dévelop­pé une cer­taine affec­tion pour nos oeu­vres (lors de mon expo indi­vidu­elle, je n’avais qua­si­ment rien pu ven­dre à cause de cela), mais le but du jeu était bien de les partager. Un peu dépassées par ce suc­cès, mais enchan­tées, bien sûr, nous avons décidé de con­tin­uer sur la lancée, et d’en refaire quelques-uns, à notre rythme, dès cet automne. Rachel a déjà trou­vé dans ses archives quelques pho­tos intéressantes…PS: Pour ceux qui n’au­raient pas com­pris le titre: “Le caméléon botanique” était le nom du tableau qui nous a servi d’affiche ;-).

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