Peu après l’épisode des lunettes belfastoises, j’entre dans un magasin de chaussures et tombe en arrêt devant une fort jolie paire: de fines baskets en cuir brun à empiècements de satin fleuri bordeaux. Malheureusement, il n’y a qu’un modèle d’exposition, trop grand, et comme les pointures sont anglaises, je ne sais pas laquelle demander. C’est que nous sommes ici au Royaume Uni- même s’il semble impossible de dénicher un café servant des afternoon teas avec des scones… Prenant donc à deux mains mon courage, la basket et mon meilleur anglais (pas toujours performant dans ce pays), je vais me renseigner auprès du vendeur. Costard gris foncé et crête de coq gominée, celui-ci s’avère étonnamment efficace. Sans tergiverser, et sans avoir l’air autrement étonné de ma requête, il sort de derrière son comptoir un instrument que je n’avais plus vu depuis mon enfance (époque où ma pointure changeait très vite): une sorte de semelle géante avec une réglette coulissante servant à mesurer la longueur du pied. J’ôte donc mes chaussures de randonnée, un peu gênée d’exposer mes chaussettes imprégnées de toute une journée de visites (par chance, elles ne sont pas trouées), et me plie à l’exercice. Verdict: taille 4. Une vendeuse m’apporte bientôt les chaussures en question, qui vont très bien. Marché conclu. Je quitte le magasin avec ma carte de crédit plus légère de quelques dizaines de livres, et l’espoir que l’automne suisse ne soit pas trop pluvieux pour que je puisse porter mes nouvelles acquisitions. En ce qui concerne l’afternoon tea, prononcé high tea en Irlande, il a finalement eu lieu quelques jours plus tard. Il a même été particulièrement high, puisque je l’ai pris durant le vol de retour, à 11’000 mètres d’altitude!