Le pinson

Un pin­son fait-il le print­emps? Ce matin, j’en ai vu un de tout près, per­ché sans peur sur le para­pet de pierre du Pont Saint Jean. Un vrai petit vit­rail vivant sur la gri­saille brumeuse du matin. Du coup, à défaut d’hi­ron­delle, j’y ai presque cru! Car plus loin, dans le jardin de l’église, un jas­min d’hiv­er fai­sait jail­lir ses branch­es d’un jaune lumineux, tan­dis qu’un mag­no­lia cou­vert de gros bou­tons de porce­laine se pré­parait à fleurir. 

Le plaisir de faire les comptes

A chaque début de mois, il faut bien rassem­bler les fac­tures à pay­er, faire les comptes. Pour cela, je m’assieds générale­ment à la table du salon, là où il y a le plus de place. Je me suis donc instal­lée, face à la porte-fenêtre ouverte. En cette fin d’après-midi print­anière, le courant d’air doux appor­tait les par­fums de la forêt et le chant des oiseaux, mésanges et surtout mer­le, qui enchaî­nait les trilles depuis un arbre voisin. Et en face de moi, sur la petite table en mar­bre du bal­con, une touffe de vio­lettes cor­nues se bal­ançait douce­ment dans son pot de terre cuite, seule tache de couleur vive sur les arbres encore nus. Du coup, avec pareille ambiance, ma corvée est presque dev­enue un plaisir. A retenir pour les mois suiv­ants puisque selon le cal­en­dri­er, on va for­cé­ment vers le beau et le chaud (du moins, on l’espère)! 

Du bon usage du bv

En par­lant de faire les comptes: par­mi les fac­tures de ce mois-ci, il y avait un bul­letin de verse­ment des­tiné à régler l’abon­nement à notre cher quo­ti­di­en local. Au bas de la let­tre d’ac­com­pa­g­ne­ment fig­u­rait une phrase sig­nalant la présence dudit bul­letin, et nous remer­ciant “d’en faire bon usage”. Doute subit: quel peut donc être le bon usage à faire d’un bul­letin de verse­ment? Une cocotte? Un avion? Un bateau (je suis très forte pour fab­ri­quer des bateaux en papi­er, si,si)? Une liste de com­mis­sions? Un allume-feu? En tous cas, spon­tané­ment, il ne me viendrait jamais à l’idée de m’en servir pour pay­er quoi que ce soit: car au fond, ce n’est que du papier! 

Un chantier surréaliste

Sur le chantier de Pérolles 2, il est temps de gar­nir d’ arbres l’ esplanade en béton qui s’é­tale entre les divers­es bâtiss­es. Ceux-ci ont donc été livrés il y a quelques jours; couchés en rang sur le sol en atten­dant d’être plan­tés, les arbustes déjà robustes mon­traient leurs racines pris­es dans de gross­es mottes de terre, elle-mêmes embal­lées dans un filet trans­par­ent. C’est d’ailleurs la pre­mière chose que j’ai remar­quée. De loin, ces mottes ovales, brun fon­cé, ressem­blaient presque à de gros oeufs de Pâques en choco­lat! Des oeufs inso­lites hors desquels pous­saient des arbres! Non loin, il y avait aus­si une pelle mécanique rose et un gros rouleau de tuyau jaune cit­ron. De quoi égay­er les façades si beiges des bâti­ments . Et d’ap­porter une touche sur­réal­iste à ce si triste chantier.

Moi et mes fringues

Chaque print­emps, en faisant la révi­sion de mes habits pour la nou­velle sai­son, c’est la même chose. Les pulls et les T‑shirts remon­tent soudain der­rière ou sont tout défor­més; les pan­talons devenus trop courts ser­rent à l’en­tre­jambe; les jupes baîl­lent à la taille tan­dis que leur ourlet sem­ble être mys­térieuse­ment remon­té d’un cran; les jacquettes zip­pées pen­douil­lent tout en gon­do­lant à la fer­me­ture; les man­teaux sem­blent ou trop vastes ou trop étroits; et plus générale­ment, l’ensem­ble paraît un brin démodé, en tout cas prodigieuse­ment peu flat­teur… A se deman­der com­ment j’ai fait pour porter tout ça sans honte l’an­née d’a­vant! Invari­able­ment, je me retrou­ve avec l’en­vie urgente de refaire toute ma garde-robe. Je me rends donc dans les mag­a­sins, l’e­spoir et la déter­mi­na­tion en ban­douil­lère. Et chaque print­emps, c’est la même chose: je repars sans rien, déprimée par la laideur et le for­mat micro­scopique de la mode pro­posée. Du coup, je remets mes vieil­leries; après tout, elles ne sont pas si mal. Et elles tien­dront bien encore une saison…