Objets perdus

Désor­mais, même les bureaux des objets trou­vés sont touchés par la tech­nolo­gie.  Finie l’époque où, ayant égaré son para­pluie dans le bus ou le train, on s’adres­sait à un guichet spé­cial dont l’employé par­courait des étagères chargées de trucs hétéro­clites pour le retrou­ver.  Mon mari en a fait l’ex­péri­ence à la gare de Berne, après avoir per­du sa cas­quette en galopant pour attrap­er un inter­ci­ty. Pre­mière chose: localis­er le bureau con­cerné, qui se cachait en fait au pre­mier étage, dans le bureau des bagages. Soit. La pièce était presque totale­ment vide, mis à part un guichet ouvert où se tenait une vigoureuse et antipathique matrone suisse-alle­mande. S.lui a donc exposé sa requête, en alle­mand, ce qui a sem­blé la dérid­er un peu. Je m’at­tendais alors à la voir dis­paraître dans un local attenant, ou du moins pass­er un coup de télé­phone. Mais non: elle nous a sim­ple­ment ten­du un for­mu­laire por­tant l’adresse d’un site inter­net. Il fal­lait s’y inscrire, décrire l’ob­jet et les cir­con­stances de sa perte, et atten­dre une réponse par email. Au revoir, mer­ci (ou plutôt “ade, mer­ci” en dialecte local). Un peu sur­pris par le procédé, S. s’y est attelé le soir même, en se deman­dant com­ment fai­saient les gens sans accès inter­net, genre les per­son­nes âgées… Un pre­mier mail est arrivé 4 jours plus tard: pas trace de la cas­quette. Sur le moment, ce sys­tème un peu dés­in­car­né m’a don­né l’im­pres­sion que le cou­vre-chef flot­tait quelque part dans le brouil­lard, hors d’at­teinte… C’é­tait un peu vrai. Six jours après tombait un sec­ond mail, défini­tif: l’ob­jet n’a tou­jours pas été retrou­vé, opéra­tions ter­minées. Reste un brin de nos­tal­gie. Pour une cas­quette en tweed ramenée d’Ir­lande, mais aus­si pour les bureaux d’ob­jets trou­vés à l’an­ci­enne, qui avaient plus de charme, et plus d’humanité.

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